dans le Var, la culture est libre... d’aller se faire voir ailleurs


article de la rubrique Toulon, le Var
date de publication : mercredi 28 janvier 2009
version imprimable : imprimer


Après l’affaire Orphéon à Cuers, sur laquelle le Canard enchaîné de la semaine revient, le Var se fait à nouveau remarquer : le conseil général sabre l’ADIAM 83, d’un coup, d’un seul.


Communiqué de l’ADIAM 83

le 26 janvier 2009

Le département du Var se distingue :
le conseil général supprime l’ADIAM 83

Depuis plus de vingt ans, les départements se sont dotés de structures oeuvrant pour le développement culturel de leurs territoires. Dans le Var, L’Adiam 83, créée en 1989, est ainsi à l’origine de nombreuses actions et événements : les Rencontres de musique médiévales du Thoronet, le festival Patrimoine en musique (concerts gratuits dans des lieux de patrimoine), le schéma départemental des enseignements artistiques (amélioration de l’offre d’enseignement musique, danse, théâtre), l’opération Danse à l’école (sensibilisation des enfants et des jeunes à la danse), des résidences d’artistes (compagnies de danse, groupes de musiques actuelles), des rencontres professionnelles, un accompagnement des acteurs culturels, des formations etc.

Aujourd’hui, l’Adiam 83, association reconnue pour la qualité de sa gestion (association certifiée ISO 9001) et de ses actions au service de la culture est gravement menacée.

Le 11 décembre 2008, revenant sur ses précédents engagements, le directeur des affaires culturelles annonce par téléphone au directeur de l’Adiam 83 que le Conseil général supprime complètement son soutien (451 250 € en 2008) à l’association pour 2009. Aucune explication écrite n’a pu être obtenue à ce jour.

En l’absence d’engagement de la part du Conseil général, l’Adiam 83 sera contrainte de se déclarer en cessation de paiement fin février et de licencier l’ensemble des salariés.

Le président et l’équipe de l’association ne peuvent accepter ce traitement qui témoigne d’un mépris des individus, de l’histoire et du travail bien fait. Ils comptent sur la mobilisation des professionnels et des élus du département pour pouvoir continuer leur action en faveur du développement culturel dans le Var.

En effet, la mort de cette association signifie l’arrêt total d’un travail continu d’accompagnement des acteurs culturels réalisé sous la forme d’études, de journées d’information, de conseil, de rencontres et de formations professionnelles.
Choqués par cette annonce brutale, les acteurs culturels du département et d’ailleurs se sont mobilisés et expriment leur incompréhension et leur colère sur le site de l’association.

Des structures départementales de développement du spectacle vivant existent dans une cinquantaine de département en France. Dans le contexte actuel de réorganisation des politiques culturelles nationales et locales, un certain nombre d’entre-elles sont amenées à évoluer dans leurs missions en accord avec les Conseils généraux et l’Etat : regroupement avec d’autres structures similaires, extension de leur périmètre, création d’établissements publics voire intégration des missions et des personnels au sein des Conseils généraux.

Le Conseil général du Var a choisi la suppression pure et simple et ne semble pas avoir évalué les conséquences de cette décision qui, à la lecture des réactions déposées sur notre site, n’auront pas échappé aux partenaires locaux et nationaux.

RASSEMBLEMENT DE SOUTIEN À L’ADIAM 83

Retrouvez l’équipe sous la banderole de l’Adiam 83
pour manifester votre désaccord avec la décision du Conseil général du Var
Jeudi 29 janvier 2009 - 10h00 - Place de la Liberté - Toulon

ADIAM 83 [1]

Cuers : halte à la subversion théâtrale !

[Le Canard enchaîné, mercredi 28 janvier 2009]

Le nouveau maire de Cuers (Var), Gilbert Perugini, l’a trompeté à son bon peuple lors de ses voeux, le 9 janvier : une « ère nouvelle » commence pour sa riante bourgade de quelque 10 000 habitants. Qu’on en juge : ce digne représentant de la « majorité présidentielle » est en train d’étrangler la principale association culturelle locale, Orphéon Théâtre intérieur, implantée depuis 1983, spécialisée dans les arts de la rue et chargée jusque-là de la saison théâtrale.

Bien que cette association soit reconnue par le ministère de la Culture, et soutenue par le conseil régional et le conseil général, le nouveau maire a supprimé unilatéralement sa subvention de plus de 20 000 euros pour l’année 2008. Puis a carrément décrété qu’il « suspendait son activité » par un édit du 4 septembre. Circulez, il n’y a désormais plus que des chansonniers et des comiques à voir !

Du coup, l’association s’est vue contrainte de licencier le documentaliste qui animait la bibliothèque théâtrale Armand Gatti. Un fonds unique dans le département de quelque 9 000 bouquins portant sur l’art dramatique, que le maire doit juger affreusement subversifs. A peine élu en mars, il avait tenté de boucler ses locaux, en faisant changer la serrure par un employé municipal ! Aujourd’hui, l’association cherche une nouvelle ville pour héberger ses livres... Avant l’autodafé ?

Le ridicule ne tuant pas, une plainte du maire contre la comédienne Caroline Amoros est aussi en souffrance depuis neuf mois sur le bureau du procureur de Toulon. Pour « dégradation de la voie publique », « incitation à la désobéissance » et « outrage au drapeau » (délit rétabli par Sarko), rien que ça ! Toutes ces incriminations à cause d’un spectacle de rue, pourtant couronné par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), au cours duquel l’artiste a écrit des slogans poétiques éphémères sur la chaussée à la peinture lavable... La comédienne a eu beau démontrer au maire, balai-brosse en main, que ses textes partaient à l’eau, il n’a rien voulu savoir et les a fait aussitôt recouvrir de peinture goudronnée ! La SACD et la Fédération nationale des arts de la rue sont ensuite intervenues pour lui faire retirer sa plainte, mais il n’en démord pas. En signe d’ouverture, il a aussi interdit les spectacles de Beckett et de Brecht qu’avait ensuite programmés l’association Orphéon...

Cela rappelle quelque chose ? Précisément la gestion culturelle du Front national dans les municipalités qu’il a détenues, comme Toulon, Marignane ou Vitrolles... Le Pen est d’ailleurs venu à Cuers en mai dernier assister à une « fête champêtre » donnée par son admirateur le comte de Pierrefeu dans son domaine viticole et il y a lancé la liste du FN pour les élections européennes dans le grand Sud-Est.

Laissons le dernier mot à M. le maire, qui s’écrie sur un prospectus municipal : « Non, la culture à Cuers n’est pas morte ; elle recouvre enfin sa liberté. »

La liberté d’aller se faire voir ailleurs ?

D. F.

Notes

[1Contacts : Adiam 83 - Hôtel de Clavier - 10, rue du Palais - 83170 Brignoles - T : 04.94.59.10.72


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP