à Baudinard, on vous a à l’oeil


article de la rubrique Big Brother > vidéosurveillance
date de publication : vendredi 13 février 2009
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Baudinard-sur-Verdon dans le Haut-Var, ses 146 habitants et ses 12 caméras de vidéo-surveillance... Bientôt 13, la dernière étant prévue pour la future déchetterie afin de « voir et sanctionner tous ceux qui se tromperont de containers en déchargeant leurs détritus ».

Un constat qui en dit long sur les « peurs que propagent les médias, jusqu’à convaincre le plus rural des hommes que ses poireaux sont menacés, ses enfants en danger, sa femme courtisée. » [1]


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« Les caméras sont la meilleure solution pour être tranquille. »

A Baudinard, on vous a à l’oeil

par Prisca Thivaud , Var Matin du 13 février 2009


Il faut le voir pour le croire ! Baudinard (canton d’Aups), 146 habitants. 51 intra-muros. Et pas moins de douze caméras de vidéosurveillance. Hallucinant. Et pourtant. Un remake du Loft, à la campagne. L’atmosphère est pesante. Question d’habitude, paraît-il.

A l’entrée du village, accrochée au feu tricolore, une première caméra, bien visible, vous souhaite la bienvenue. Puis tous les dix mètres environ, bis repetita. Droit devant, à gauche, à droite... « on » vous a à l’oeil.

Depuis 2007, le maire, Georges Pons - élu en 1978 - a décidé de garantir à ses administrés une sécurité totale. Défiant vandales et cambrioleurs de s’aventurer dans ce petit village perché du haut-Var.

Ni police, ni garde champêtre

Une mesure appliquée, selon MM. Donatien et Hugues, ses adjoints, à la suite de la mobilisation des anciens, excédés par des dégradations de véhicules et des vols dans les maisons.

« Ça a fait du bruit au départ, avouent les deux élus. Certains étaient opposés, au nom de l’atteinte à la liberté. Ceux-là mêmes qui viennent nous voir quand leur véhicule est abîmé ! Mais c’était la meilleure solution pour être tranquille, car nous n’avons ni police municipale ni garde champêtre. »

En cas de problème, les Baudinardais dépendent des brigades de gendarmerie d’Aups et de Salernes. Pour l’anecdote, se souvient Jean Hugues, « il y a quelques années, nous avons eu besoin d’eux. Ce sont les gendarmes du Luc qui sont montés ! »

Hormis les caméras placées dans la rue principale, vous serez aussi filmés si vous vous rendez à l’église, au cimetière, au belvédère ou sur les courts de tennis !

Dans le village, les avis divergent, même si peu osent s’exprimer franchement, à visage découvert. « Par peur des représailles », disent-ils.

« J’habite là depuis onze ans et je trouve ça complètement aberrant. Pourquoi dépenser autant d’argent dans un si petit village ? Elles n’ont été installées par le maire que pour surveiller les habitants. Un jour, il a même parlé de certains chiens qui faisaient leurs besoins sur les trottoirs ! »

« On est protégé c’est agréable »

Pour Nicolas, responsable du Chardon, Bistrot de pays, le constat est plutôt positif. « Au début, c’est choquant, on se croit sur le Rocher de Monaco. Mais en tant que commerçant, on est protégé. C’est agréable, nos voitures ne sont plus fracturées. Il y a eu des vols à Sainte-Croix, Riez et Salernes. Rien ici. Je peux laisser mes tables dehors la nuit. Et pour tout vous dire, le seul client qui est parti sans payer, je l’ai récupéré à l’aide de la caméra. »

Pour le maire, aucune hésitation donc. Les caméras font partie intégrante du village. Pour compléter le dispositif, qui représente un investissement de 60 000 euros, des alarmes ont été installées, en mairie, à la salle des associations, la salle polyvalente, aux ateliers communaux... et à l’église !

Et pour couronner le tout, un scoop : une treizième caméra entrera en fonction lors de l’ouverture de la future déchetterie, « pour voir et sanctionner tous ceux qui se tromperont de containers en déchargeant leurs détritus ».

Prisca Thivaud


Les caméras de vidéo-surveillance envahissent nos campagnes

(Vidéo ajoutée le 12 mai 2010.)

Les maires du haut-Var critiquent le dispositif

Contactés, les maires des communes voisines ont fait part de leur sentiment quant à l’installation de caméras de vidéo-surveillance.

Antoine Faure, Aups : « Nous ne sommes pas équipés de caméras. Il y a une demande de la gendarmerie, mais il semblerait que la criminalité ne baisse pas, mais se déplace. Je pense que le résultat obtenu par rapport à l’investissement n’est pas intéressant Qui plus est, je pense que les caméras fonctionnent pour la petite délinquance seulement. Je préférerais que les services de gendarmerie soient renforcés à la place. Nous avons besoin d’une présence sur le terrain. Pour moi, Baudinard est un cas excessif. Tout ça pour attraper un chien qui fait ses besoins sur le trottoir un enfant qui joue au tennis sans payer ou um client qui part sans régler... »

Michel Pelloquin, Bauduen : « Nous ne voulons pas de caméras. Nous avons d’autres priorités. Si nous arrivions à fonctionner en intercommunalité, nous pourrions alors mettre en place une police municipale, des gardes champêtres. Mais ce n’est pas le cas. »

Nicole Fanelli, Salernes : « Cinq caméras ont été installées par l’ancienne municipalité dans le centre-ville. J’étais contre à l’époque, lorsque j’étais dans l’opposition. J’estime que selon où elles sont placées, c’est une atteinte à la vie privée. Près des écoles, des parkings, je ne mis pas contre.
L’investissement a été coûteux. L’entretien aussi. Je ne suis pas convaincue de leur utilité, mois je ne vais pas les enlever Nous allons peut-être revoir l’implantation de certaines. Mais les caméras ne font que déplacer le problème. Je préférerais qu’il y ait plus de rondes de police, plus d’hommes sur le terrain. »

André Coldeboeuf, les Salles-sur-Verdon : « C’est hors de question. Il n’y a pas plus de délinquance qu’ailleurs. Nous n’avons pas besoin de cela dans un si petit village. »
Douze caméras pour 146 habitants, d’aucuns trouvent cela beaucoup pour un si petit village.

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Baudinard.

Notes

[1Extrait de « La parano dans le champ de poireaux », billet de Pierre Johann, Var Matin du 13 février 2009.


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