Vitrolles : les années noires


article de la rubrique extrême droite
date de publication : octobre 2002
version imprimable : imprimer


1997-2002 : les années Mégret


Rappels

- 1995 - Jean-Jacques Anglade, maire socialiste sortant est réélu avec 335 voix d’avance sur Bruno Mégret (43 % des voix pour la liste FN).

- 1996 - Le Conseil d’Etat annule l’élection précédente ; dans le même temps, il déclare Bruno Mégret inéligible pour cause de dépassement des dépenses autorisées de campagne.

- février 1997 - Nouvelle élection : Catherine Mégret, qui a remplacé son mari en tête de liste du FN, devient maire de Vitrolles, avec 52,5 % des voix.

- 1999 - Bruno Mégret quitte le FN pour créer le MNR (Mouvement national républicain).

- mars 2001 - Catherine Mégret est réélue maire au second tour avec 201 voix d’avance (45,3% des voix, contre 44,1% pour la liste de la gauche unie de Dominique Tichadou et 10,6% pour la liste RPR-UDF de Christian Rossi).

- 2002 - En juin, le Conseil d’Etat annule à nouveau les résultats de l’élection municipale, à cause d’un tract du MNR diffamatoire envers le candidat de la droite (Rossi).

- 6 octobre 2002 - Catherine Mégret perd les élections municipales de Vitrolles face au socialiste Guy Obino (54,05%). Celui-ci menait un large rassemblement des partis de gauche et du mouvement associatif de la ville.

1997 à 2002 - cinq années noires

A partir de février 1997, Catherine Mégret va, brutalement, méprisant les règles élémentaires de fonctionnement d’une collectivité territoriale, appliquer l’idéologie véhiculée par le Front national. Quelque exemples rassemblés par la section locale de la LDH :

Culture et "identité"

- L’association le "Sous-Marin" devient la cible des élus F.N. dès juin 1997 : suppression de la subvention de 200 000F soit plus de 20% du budget.

- En présence de deux élus et du service d’ordre, les entrées du Café Musique sont murées, ce qui induit une tension extraordinaire ; les CRS appelés en renfort viennent "protéger" les élus FN et leurs complices.

- En 1998, Régine Juin , directrice du cinéma les "Lumières" en gestion municipale, classé Art et Essai, est licenciée. Il lui est reproché par les élus FN d’avoir programmé et maintenu un film suivi d’un débat sur le sida. Vitrolles ville de près de 40 000 habitants n’a plus de salle de cinéma !

- La même année, l’association "moulin à jazz" voit sa subvention amputée de 70% ; elle résistera grâce aux subventions du Conseil général des Bouches du Rhône.

- Septembre 97 : "Notre ville fière de son identité entend affirmer avec éclat l’identité française et provençale" (Catherine Megret- lettre du Maire- n°3) Vitrolles devient Vitrolles en Provence.

- Arbitrairement des noms de rues et de places sont changés : la place Nelson Mandela se transforme en place de Provence ; le square Dulcie September devient le square Marguerite de Provence ; l’avenue Salvador Allende est remplacée par avenue Mère Térésa ; l’avenue Jean-Marie Tjibaou portera le nom de Jean-Pierre Stirbois délégué du FN ...

La préférence nationale

- Janvier 1998 : une allocation de naissance d’un montant de 5 000F (762 €) est allouée aux enfants de parents français ou ressortissants de l’Union européenne. Catherine Mégret sera condamnée pour discrimination à 3 mois de prison avec sursis, une amende de 15 245 €, et deux ans d’inégibilité.

- Fraternité française, association d’extrême droite s’installe à Vitrolles avec le soutien des élus en place.

Le personnel - La police municipale

- Avril 1997 : licenciement des éducateurs de rue et agents de prévention (affectés dans les bus) - "l’éducation ne se fait pas dans la rue" proclame Bruno Megret, porte parole officiel de Madame !

- licenciement de 84 auxiliaires et contractuels.

- brimades, mutations abusives d’un service à l’autre, atteinte à la vie privée pour les fonctionnaires en place qui tentent de résister.

- 50 cadres quittent la ville, les services sont bloqués.

- "que la peur change de camp" affirme Mme le maire qui renforce la police municipale ( + 50%) : les contrôles musclés s’intensifient en direction des jeunes de certains quartiers mis à l’index (les Pins, la Frescoule).

Gestion et finances

- Incompétence : pour élaborer le budget les élus FN font appel à un cabinet privé. En conseil municipal le responsable de ce cabinet répond à la place de l’adjoint aux finances dépassé par les questions !
- Rapport accablant de la Cour régionale des comptes sur la gestion Megret. Le Commissaire du gouvernement de la CRC saisit le Procureur de la République d’Aix en Provence d’irrégularités susceptibles de constituer des délits (prix de l’eau : + 20% ; envoi de courriers à l’ensemble des maires de France pour la campagne présidentielle de Bruno Mégret ; frais de représentation abusifs ...).

Cet aperçu, bien qu’incomplet, illustre les dérives, l’incompétence dans la gestion, le mépris envers la population des élus de l’extrême droite lorsqu’ils ont le pouvoir. Ils ont laissé Vitrolles déboussolée, exsangue.

La chambre régionale des comptes critique vivement la gestion de Catherine Mégret à Vitrolles

par Michel Samson [ LE MONDE, le 16 mai 2002 ]

Adressées à la mi-février à la municipalité de Catherine Mégret (MNR), les observations provisoires de la chambre régionale des comptes (CRC) sur la gestion de la commune de Vitrolles (Bouches-du-Rhône) dressent un tableau accablant de la gestion de la mairie depuis l’élection de Catherine Mégret, en 1997.

Il en ressort que l’évolution des budgets semble conduire la ville à la faillite dans une fuite en avant, que l’argent des contribuables vitrollais est employé à des fins qui leur paraissent étrangères, et que la gestion du personnel, comme l’attribution des marchés publics, s’effectue dans un certain chaos. Dans un courrier daté 6 février, le commissaire du gouvernement de la CRC a d’ailleurs officiellement saisi le procureur de la République à Aix-en-Provence de plusieurs des faits dénoncés dans le rapport, qui pourraient être qualifiables pénalement.

Ayant fait campagne sur la baisse des impôts, l’équipe du MNR paraît avoir eu recours à de discrets artifices pour payer ses échéances."La trésorerie de la commune est largement assurée par les usagers de l’eau, qui ont eu à supporter une hausse brutale des tarifs en 1997", écrivent notamment les magistrats de la CRC, précisant : "L’usager a joué le rôle d’un prêteur non rémunéré, chaque famille ayant été créancière de plusieurs milliers de francs au bénéfice du budget principal de la commune, lui permettant de faire face à ses problèmes de trésorerie."

Pour équilibrer son budget, deux années de suite, la ville a ensuite repoussé les remboursements de ses dettes, "au prix d’opérations financières douteuses", indiquent les magistrats financiers.

Les rapporteurs recensent des pratiques qui pourraient dévoiler l’utilisation de fonds publics à des fins partisanes. Notant qu’il n’existe aucun "enregistrement du courrier départ", le texte précise que "ce fonctionnement a permis, en 2000 et 2001, l’envoi de plusieurs courriers à tous les maires de France dont l’intérêt communal n’est pas évident". Le document souligne en revanche que ce mailing pourrait avoir eu pour objet de "recueillir des signatures pour permettre à M. Bruno Mégret de se présenter à l’élection présidentielle". Le coût global de ces envois est évalué à 75 000 euros (environ 500 000 francs).

DÉPENSES CONTESTABLES

Au terme de leurs investigations, les magistrats de la CRC relèvent également l’acquisition par la commune de 150 téléphones portables dont "la liste attributaire n’a pu être obtenue"et semble inconnue des services -"au point que le directeur des services techniques (...) envisageait d’appeler les numéros facturés à la ville pour savoir qui en bénéficiait", indique le rapport. Dans ce flou administratif, les bénéficiaires des téléphones ont mis à la charge de la ville d’imposantes notes, notamment pour des appels internationaux.

L’essentiel des frais de représentation accordés au maire, Mme Mégret, 50 000 euros (350 000 francs), ont, par ailleurs, "été consommés par des repas parfois pris en groupe, mais le plus souvent à deux ou trois, notamment le week-end".

A ces dépenses contestables s’ajoute une gestion du personnel hasardeuse. Comptant "un agent pour 38 habitants, c’est-à-dire 30 % de plus qu’ailleurs", la municipalité vitrollaise a installé "une administration municipale qui manque cruellement de compétences", dit le rapport, relevant que "de nombreux services n’ont pas de responsable" avec pour conséquence "l’intervention de consultants extérieurs pour remplir des missions habituellement assurées par les services municipaux"

Au total, selon le rapport, la gestion de Mme Mégret - auprès de qui M. Mégret, lui-même candidat aux municipales en 1995, joua le rôle de "porte-parole"- conduit à ce que "les frais de personnel par habitant dépassent 762 euros (5 000 francs)", contre 557 euros (3 653 francs) de moyenne régionale pour les villes de taille comparable. Cette inflation paraît avoir profité à quelques privilégiés : les magistrats notent que "certains agents auxiliaires bénéficient de manière récurrente et abondante d’heures supplémentaires qui leur sont payées" et préconisent une réorganisation des services "pour que ceux qui travaillent le soir, la nuit et les jours fériés ne soient pas les mêmes qui travaillent les jours ouvrables".

Décrivant la chute du nombre des agents d’encadrement (de 60 en 1996 à 19 en 2000), la CRC en détaille les conséquences : commissions paritaires sur le personnel tenues dans des conditions contestables ou incapacité à préparer correctement les attributions de marchés publics. Alors que le contrat d’exploitation des cantines scolaires arrivait à échéance en novembre 2000, la procédure d’attribution "destinée à assurer la continuité du service public" n’avait pas été lancée cinq mois plus tard. Seul un bricolage hâtif - et apparemment onéreux - avait permis d’assurer la rentrée scolaire.

La maîtrise des dépenses engagées s’en ressent aussi. Alors que la réhabilitation du centre culturel Fontblanche était votée le 20 janvier 1998, le démarrage des travaux n’a commencé qu’en avril 2002, "trois ans après que le maître d’œuvre a été choisi".

S’agissant du dossier de la propreté urbaine, le rapport signale "l’obstination de la commune dans le choix du prestataire", la Polyurbaine, lors de l’appel d’offres, sur la foi de "notes dont la logique surprend". Il conclut surtout que l’objectif d’économie affiché "n’a pas été atteint", alors que le premier adjoint admet que le service rendu n’est pas bon : il faut régler le mauvais prestataire et continuer de payer les salariés de la ville qui assuraient ce service.

Quant aux licenciements de 31 contractuels, effectués à la hussarde en 1997, il a coûté plus de 94 000 euros à la ville, alors que "la durée moyenne résiduelle des contrats des agents licenciés [était] de six mois à peine". S’y sont ajoutés les frais de justice et d’avocats.

____________________________________

Le cabinet de la maire répond au "Monde"

Le cabinet de la maire (MNR) de Vitrolles, Catherine Mégret, a répondu par écrit aux éléments relevés par Le Mondedans le rapport de la CRC. Concernant l’augmentation du prix de l’eau, il nie les accusations et estime que "l’opération doit être appréciée globalement". Les lettres appelant au soutien de Bruno Mégret à l’élection présidentielle auraient été "envoyées par erreur" et ce dysfonctionnement "régularisé" depuis lors. S’agissant des téléphones portables, "plusieurs dizaines ont été supprimés" à l’automne 2001, indique la mairie. Quant aux repas dominicaux de Mme Mégret, ils visaient à "rencontrer des représentants des associations, de groupements de sa municipalité et des maires d’autres villes". "Vitrolles-en-Provence n’est pas Neuilly-sur-Seine (...) et n’a pas les mêmes ratios qu’une ville riche", indique la réponse à propos des questions de personnels, ajoutant que les heures supplémentaires correspondent à des forfaits "tout à fait légaux". La mairie assure avoir eu "très peu" de candidatures aux postes de directeur et avoir dû faire appel à l’extérieur pour préparer son budget. Répondant aux critiques de la CRC sur la propreté urbaine, le cabinet écrit : "Le coût de la prestation assurée auparavant en régie représentait 19 millions de francs, il est maintenant de 13 millions."


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP