Bradley Manning, l’analyste de l’armée américaine, qui est accusé d’avoir transmis à WikiLeaks des documents classés secret-défense, vient de se voir décerner le prix 2013 de l’International Peace Bureau. L’association a déclaré vouloir ainsi saluer le courage du jeune militaire qui a révélé des informations sur les crimes de guerre américains.
Bradley Manning avait voulu provoquer un débat public... il encourt la prison à perpétuité.
Dernière minute [mardi 30 juillet 19h30] Bradley Manning non coupable de "collusion avec l’ennemi" mais coupable "d’espionnage".
Le soldat, qui était accusé d’avoir transmis plusieurs centaines de milliers de documents confidentiels à WikiLeaks, a été reconnu non coupable du principal chef d’inculpation, mais la cour martiale de Fort Meade l’a jugé coupable d’espionnage et de vol de documents. Sa peine sera fixée lors d’une audience ultérieure.
[Genève, le 19 juillet 2013] – Bradley Manning a été arrêté en mai 2010 après avoir transmis plus de 250 000 câbles diplomatiques américains, 400 000 rapports de l’armée des États-Unis sur l’Irak et 90 000 autres sur l’Afghanistan, ainsi que ce qui a permis à WikiLeaks de réaliser la vidéo « Collateral Murder » : les vidéos du raid aérien du 12 juillet 2007 sur Bagdad, et le raid Garani de 2009 sur l’Afghanistan. À l’époque, cela constituait la plus grande quantité de documents à diffusion restreinte jamais rendu public. WikiLeaks et ses médias partenaires en ont publié la plus grande partie entre avril et novembre 2010.
Jusu’à présent, Manning a été détenu pendant trois ans – d’abord au Koweït, puis à l’isolement dans le Corps Brig Marine à Quantico, en Virginie, et enfin dans une prison militaire à sécurité moyenne à Fort Leavenworth, au Kansas, avant d’être inculpé de 22 infractions, y compris la communication des informations de défense nationale à une source non autorisée et aide à l’ennemi. Il a plaidé coupable en Février 2013 pour 10 des 22 chefs d’accusation, ce qui pourrait mener à une peine pouvant aller jusqu’à 20 ans. Une condamnation à la détention à vie est également possible. Son procès est susceptible d’être conclu dans les prochains jours.
Selon Tomas Magnusson, co-président d’IPB : « IPB estime que faire connaître les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité est une des obligations morales les plus élevées qui s’impose à un citoyen. C’est la signification au sens large des Principes énoncés à Nuremberg à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Lorsque Manning a révélé au monde les crimes commis par l’armée américaine il l’a fait en obéissant à ce devoir moral élevé ». C’est pour cette raison que Manning a également été nominé pour le Prix Nobel de la Paix. De façon générale, il est bien connu que les opérations militaires, et en particulier celles qui sont illégales, sont fréquemment menées sous le couvert du secret. Briser ce mur du secret en révélant des informations qui doivent être
accessibles à tous est une contribution importante à la lutte contre la guerre, et c’est un défi pour le système militaire qui domine à la fois l’économie et la société de notre monde. IPB estime que le rôle des dénonciateurs est essentiel pour la défense des démocraties – en particulier dans le domaine de la défense et de la sécurité. Une lourde peine pour Manning serait non seulement injuste, mais aurait également des effets très négatifs sur le droit à la liberté d’expression que les États-Unis prétendent défendre.
Le prix MacBride, ainsi dénommé en hommage à l’homme d’Etat irlandais Sean MacBride, qui a partagé le prix Nobel de la paix en 1974, est décerné à des personnes ou organismes pour leur travail exceptionnel en faveur de la paix, du désarmement et des droits de l’homme.
[AFP - 30 juillet 2013 - http://www.20min.ch/ro/news/monde/s...] – Le jeune soldat américain doit connaître mardi le verdict de la justice militaire pour la plus importante fuite de documents secrets de l’histoire américaine, qu’il a organisée vers le site WikiLeaks.
Sur la base militaire de Fort Meade, au nord de Washington, où se tient depuis juin le procès en cour martiale, la juge militaire a prévu de rendre sa décision à 13H00 locales (18H00 suisses).
La colonel Denise Lind devrait passer en revue les 22 chefs d’accusation du soldat de 25 ans, traduit devant la justice militaire pour avoir transmis des dizaines de milliers de documents confidentiels au site WikiLeaks qui les a mis en ligne.
Bradley Manning encourt la réclusion criminelle à perpétuité sans possibilité de remise de peine s’il est reconnu coupable de la seule charge de « collusion avec l’ennemi », le plus grave des 22 chefs d’accusation.
700 000 documents
Le soldat de 25 ans a reconnu avoir transmis quelque 700’000 documents militaires et diplomatiques au site WikiLeaks, lorsqu’il était analyste du renseignement en Irak, de novembre 2009 à son arrestation en mai 2010.
Il a même plaidé partiellement coupable de dix charges pour un total de 20 ans de prison. Mais il a plaidé non-coupable des autres charges, dont celle d’avoir sciemment aidé al-Qaida.
Pour le reconnaître coupable de « collusion avec l’ennemi », la juge doit être convaincue « au delà du doute raisonnable » que Manning avait conscience que ces documents pouvaient finir entre les mains du réseau extrémiste.
Personnalité troublée
Manning, présenté par sa défense comme un être fragilisé par ses troubles d’identité sexuelle, encourt au total 154 ans de prison pour les 21 autres charges et violations du code militaire, dont « conduite de nature à jeter le discrédit sur les forces armées », fraude informatique, vols et atteintes à la loi sur l’espionnage de 1917 [2].
Son avocat David Coombs a demandé l’acquittement pour les accusations d’espionnage, de fraude informatique et « de collusion avec l’ennemi ». Lors de ses plaidoiries finales, il a soutenu que Manning n’était pas un traître, comme l’affirme l’accusation, mais quelqu’un de « jeune, naïf et bien intentionné », qui a été choqué par ce qu’il a vu en Irak.
L’avocat avait montré la vidéo d’une bavure commise par un hélicoptère de combat contre des civils en Irak en juillet 2007, que Manning a livrée à WikiLeaks car elle lui faisait horreur.
Pas un mot
Manning ne s’était pas exprimé lors du procès mais lors d’une audience préliminaire, il avait lu une longue lettre de justification dans laquelle il affirmait avoir voulu « provoquer un débat public ».
Lors de son réquisitoire, l’accusation l’avait au contraire dépeint comme un être égoïste et téméraire, qui savait bien qu’en transmettant des documents à WikiLeaks, ils seraient mis en ligne et consultés par les ennemis des Etats-Unis, en premier lieu Al-Qaïda.
« Votre honneur, ce n’était pas un lanceur d’alerte, c’était un traître », avait asséné le procureur militaire Ashden Fein, en requérant une condamnation pour aide à l’ennemi.
Députés européens en soutien
Selon le réseau de soutien de Manning, 17 députés européens ont écrit une lettre au président Barack Obama et au ministre de la Défense Chuck Hagel à la veille du verdict, appelant à la libération du soldat estimant qu’il a « déjà trop souffert » en endurant l’isolement en détention.
Une fois le verdict énoncé, la phase du procès consacrée à fixer la peine pourra commencer, vraisemblablement dès mercredi.
Quelques informations d’actualité :
29 juillet 2013 : 17 eurodéputés s’adressent au président Obama pour lui demander la libération de Bradley Manning : http://www.bradleymanning.org/featured/european-parliamentarians-call-on-president-obama-to-free-bradley-manning
18 juillet 2013 : Amnesty International qualifie l’accusation de « collusion avec l’ennemi » de “parodie de justice” :
http://www.amnesty.fr/Presse/Commun...
[1] Référence :
http://www.ipb.org/web/index.php?mostra=news&menu=News&id_nom=IPB+awards+MacBride+Peace+Prize+2013+to+US+whistleblower+Bradley+Manning
L’organisation IPB prévoit une cérémonie de remise de ce prix le 14 septembre 2013 à Stockholm : ttp ://www.ipb.org/uploads/tbl_event....
[2] [Note de LDH-Toulon] – La loi américaine sur l’espionnage, au nom de laquelle il est poursuivi, a été utilisée neuf fois depuis sa promulgation en 1917, dont six fois depuis que Obama est président. (Référence : « Les lanceurs d’alerte : héros des temps modernes ? », Nouvel Observateur, le 11-07-2013 : http://tempsreel.nouvelobs.com/soci....)